“Voici l’Etat bafoué, la nation défiée, notre puissance ébranlée, notre place et notre rôle en Afrique compromis”
— De Gaulle – 23 avril 1961.

Notre dignité sur elle s’est repliée
Quand, menacés d’être emportés pieds et poings liés,
Nous nous sommes cloîtrés entre nos quatre murs,
Tapis dans les portes d’un lieu qu’on croyait sûr.

Nous avions l’air d’un oiseau aux plumes coupées
Qu’il soumet aux mues, qui de larmes se repaît.
Boire et manger étaient notre unique souci,
Le mirage un espoir quand le temps s’adoucit.

Nous avons renoncé à ce qui constitue
Une entrave au succès, matière à détritus,
Mais, n’avons défendu aucun arpent de terre
Des assauts ennemis le long de nos frontières.

Nous avons subi la plus lourde des défaites.
Malheur aux vaincus, d’en-bas ou des hautes faîtes.
L’ennemi ayant fini par nous mystifier,
Nous a asservis, par la force pacifiés.

Puis, le Protectorat est venu s’installer
Dressant un nouvel ordre comme pis-aller.
Oh! un temps fort long s’est écoulé, raviné
Comme un versant qui emporte tous les damnés.

Les décisions sont prises selon les désirs
De l’occupant que seul trahit son faux sourire.
Ils ont tout mis en oeuvre pour nous désunir,
En promulguant des lois initiées par leurs sbires.

En instaurant des coutumes blasphématoires,
Ils couvrent “le Chraâ” d’un vice rédhibitoire.
Nombreux sont tous ces plans d’action qu’ils ont dressés,
Oeuvres de mains expertes qui les ont tracés.

Ces plans leur ont été inspirés dans le but
De tirer de l’oeuvre finie un juste tribut
Sans tomber dans les artifices et les ruses
Qui voilent l’esprit d’une brume diffuse.

Puis, la prière du “Latif” a annoncé
Qu’une ère nouvelle venait de commencer,
Aucune force ni aucun pouvoir qu’on craint
Ne peut venir à bout d’un peuple qui se plaint.

A Salé, forte était la prise de conscience,
Suivie ailleurs dans une grande effervescence,
Dite dans un élan d’ardeur patriotique,
La prière a atteint les fibres aurhentiques.

Couronné en bas âge, Abdelaziz, enfant,
Etait un jouet qui amusait les grands.
Loin de lui de penser aux affaires d’Etat,
Seuls le charmaient les présents des grands potentats,

Ils nous ont assiégés et asservis,
Faisant de nous un peuple assailli et sans vie
Pour nous empêcher d’avoir recours à autrui,
Appeler au secours, serait-ce en cas fortuit.

Abdelhafid s’est révolté contre son frère,
Mais les riches n’ont fait aucun pas vers la guerre.
Il a tâté le pouls pour voir si la nation
Etait encor en vie, mais c’était la vision

De la mort qui maintenait son coeur exalté
Par le souffle de révolte qui le hantait,
Les plus aisés se dérobaient à leur devoir
En se laissant “protéger”comme échappatoire.

Leur souci d’avarice nous privait d’avoir
Le renfort pour défendre notre territoire.
Notre armée vivait dans une misère crasse,
Pendant que les nantis fuyaient de guerre lasse.

Leur conscience de soi n’est que fort peu de choses
Tant que la voie du vrai n’est pas leur vraie cause,
Que les crieurs publics n’incitent pas les gens
A se révolter contre ces piètres agents.

Nous sommes dans un tel état d’agitation
Qu’un ciel noir prédit une nuit de perdition.
Il n’a trouvé aucun homme de grand courage,
Aucun homme d’esprit dans tout son entourage.

Seul grouillait tout autour, pour se remplir les poches,
Un ramassis zélé de profiteurs sous roche.
Nombreux étaient ceux enrichis par la rapine,
Qui, pour voler, avaient recours à leurs combines.

Mais, lorsqu’ils se voient réprimés dans leurs abus,
Ils prétendent les hériter d’un vieux tribut.
Nul ne peut sans lutter s’afficher victorieux.
La liberté s’acquiert dans des combats furieux,

A ses portes d’accès seuls cognent des bras forts,
Habitués au sang qui coule dans les fors.
Si le peuple n’est pas secouru par les siens,
De toutes leurs forces, qui sera son soutien?

Si l’honneur du peuple n’est pas bien protégé
Par ses fils, il sera bien vite endommagé
Par les armes à feu qui roulent flots et cris
Et ferment toute possibilité d’abri.

Ils sont les seuls pendant les moments difficiles
A l’aider à faire face aux projectiles.
Mais, quand disparaît à jamais son porte-espoir,
Tout est perdu hormis le rêve de la gloire.

Ils ont absorbé du poison de coloquinte
Vidant la coupe du malheur qui les éreinte.
Souvent, ils ont été de rage mortifiés
En recevant des soufflets qui les tuméfiaient.