(I)

J’ai aperçu de loin dans mon imaginaire
Le réel admis sous contrôle d’inventaire.
J’ai vu la jeunesse faire fi de ses moeurs
Ravalant la morale à des rangs inférieurs.

Je l’ai vue lancer ses seaux dans le discrédit
Et, sans rien recueillir, en témoin se dédit.
Ils se sont révélés ainsi de grands hâbleurs.
L’indépendance, ils l’ont revendiquée sur l’heure.

Ils ont fait le tour de tous les lieux de plaisir,
Où la vie de débauche aide à se divertir.
Ils croient que le progrès consiste à défiler
Le visage astiqué, l’habit tout bariolé.

Ils ont instauré des maisons de tolérance
Et s’y sont travestis en héros de romance.
Le chômage est le lot de tous ces dépravés
Qui sont une charge pour parents éprouvés.

L’état de déchéance est produit par autrui,
non par qui, du progrès, se prétend point d’appui.
Ils ont dégainé leur sabre contre nos moeurs
Et dépouillé les gens de toutes les valeurs.

Ils se sont montrés d’une arrogance insolite,
Doublée d’ignorance, doctrine favorite.
Ils se sont mis au haut sommet de la grandeur,
Et se sont comportés en tant qu’usurpateurs.

Vous n’atteindrez jamais les cimes de la gloire
Si vous n’en affrontez pas risques et déboires.
Je ne vois dans vos rangs aucun réformateur
Et, s’il s’en trouvait un, il manquerait d’ardeur.

Etudes, recherches, rien ne les intéresse.
Seule les attire la voie de la paresse.
La religion pour eux est à l’arrière-plan;
Prétendre s’en passer se dit à tout venant.

Quand ils sont provoqués dans une polémique,
Ils se limitent à des propos sarcastiques
et font preuve d’une lâcheté des plus viles,
Quand le silence est d’or pour tout esprit docile.

On les voit arborer l’air fier et victorieux,
Tous, grands, petits, hommes, femmes, jeunes et vieux.
Mais quand ils veulent se repaître de chimères,
Le courage à lui seul n’exclut pas leurs revers.

Ah! S’ils pouvaient au moins dire ce qu’ils en pensent.
Mais, le pitre inepte ment avec impudence
Et du savoir se met à débiter son flot,
Prétendant détenir ainsi la clé des mots

Auxquels répugnent la plupart des auditeurs
Qui y voient la cible rêvée des détracteurs,
Autant d’abrutis qui sont allés jusqu’à dire:
Le parler moderne s’apprend sans coup férir.

(II)

Jeunesse qui as glissé dans l’impiété,
Tu te fourvois dans un monde d’insanités,
Croyant ainsi faire de nouvelles conquêtes,
Fêtées tambour battant, au son de la trompette.

Tu as renoncé à ta langue et tes usages,
Pour suivre de l’intrus la déplorable image
Et adopter ainsi tous les us et coutumes
Qu’il soulève comme un vrai tourbillon d’écume.

Dans la francopholie tu as vu une aubaine
Pour en tirer une fausse fierté hautaine,
Fierté qui échoit en prime de récompense
A ceux qui sont loyaux en toutes circonstances.

Jeunesse qui rates toujours le coeur de cible,
Car, par tempérament, tu es fort irrascible,
Noyée dans un fébrile état d’agitation
Qui, d’échec en échec, te fait perdre raison.

Tu as dressé en face d’une langue noble,
Qui nous a allaités, un mur de honte ignoble,
Langue dont la gloire est due au Livre sacré,
Qui nous transmit tant de messages éthérés.

C’est un fort protecteur de tout être bien né,
Qui joint du coeur et de l’esprit les dons innés.
C’est une source de lumière qui éclaire
Ce que dissimulent ignorance et misère.

L’essence de toutes choses y transparaît
Dans l’éclat de beauté de ses nombreux attraits.
Douces y sont les moeurs au contact des idées
Et des enseignements que le verbe a mandés,

Nous laissant devant lui tout ouïe tout oreilles,
A faire assaut d’esprit pour chanter ses merveilles,
Puisant dans l’harmonie du chant le sentiment
Qui fait rêver à la voûte du firmament.

Pour les âmes bien nées l’oreille en est flattée;
L’esprit en est nourri de voeux de chasteté.
C’est une source d’où jaillit une eau limpide,
Agréable au goût fade et des plus insipides.

Ils ont tout essayé pour nous en détourner,
En nous servant de l’eau croupie et avinée,
Dans l’espoir de nous voir ainsi vivre isolés
De ses enseignements, quitte à les refouler.

L’homme sait que la vie qui bat dans ses artères
Lui obstrue l’accès à cette voie sur terre.
La vraie stabilité, il sait qu’elle ne s’acquiert
Qu’après qu’on ait douté de ce qu’elle requiert.

Nos jeunes ont choisi d’en ignorer la lettre,
Voire de renier la langue des ancêtres
Et se sont contentés d’une langue excentrique,
Se privant de la leur au parfum idyllique.

L’eau qu’on boit est chauffée jusqu’à ébulition
Sur un feu attisé d’opprobre en combustion.
Ils se sont appliqués à déclarer licite
Le commerce du vin au mépris de nos rites.