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“Je connais maint detteur qui tous les jours se sauve”
— Jean de La Fontaine.

J’ai espéré voiler un tas de préjudices
Qui m’ont imposé tant de très lourds sacrifices
Qu’un ami, mû par la volonté de me nuire,
A provoqués en se laissant ainsi flétrir.

Il n’a tenu aucun compte de mon état
D’indigence qui me cloue sur mon grabat.
Refusant de payer sa dette à terme échu;
Faisant fi de l’accord entre nous convenu.

Il prend ainsi tout son temps pour me rembourser,
Sans prier d’en être hic et nunc dispensé.
Peu lui chaut que je joins à peine les deux bouts,
Que l’état de besoin augmente mon courroux.

Il eût été plus digne et bien mieux inspiré
De m’aider à faire face à mes arriérés.
Mais il ne pense qu’à construire sa demeure,
Un imposant palais, émaillé de splendeurs.

Sait-on jamais si cet outrage à la raison
Ne dévoile un jour un acte de corruption?

Dans l’au-delà il en sera récompensé,
Par le feu de l’enfer dont il est menacé,
Sauf s’il fait aussitôt acte de contrition,
Et qu’il rejette tout motif de perdition,

Bien avant que sa vie, vouée à disparaître,
Malgré tous les attraits qu’elle lui fait paraître,
Qui bercent d’illusions, induisent en erreur,
N’approche de sa fin, quand enfin sonne l’heure.

C’est à Dieu le Très Haut que j’élève ma plainte,
Contre cet éhonté, que rien ainsi n’éreinte,
Et qui ne cesse de me faire patienter
Au nom de la sacrée et sainte probité.

Il a porté atteinte à ma réputation
En mésestimant mon pouvoir de réaction,
Ignorant le danger que je lui fais courir
Au fil de la plume prête à venger mon ire.

Mais quand on se conduit en rustre malappris,
Et qu’on n’est pas vraiment touché par mon mépris,
Comment va-t-on ainsi se montrer avenant,
Pour me traîter avec l’égard dû à mon rang?

J’ai été victime de ses nombreux mensonges
Emportés par le vent pour n’être plus qu’un songe.
Mais il ne tardera pas à prendre conscience
Quand il se brûlera au feu de mes semonces.

Il est fort probable qu’en vidant son carquois,
Il réfléchira à son acte et par deux fois,
En voyant le registre où il est fait mention
Des hommes de valeur et de leur filiation.

En franchissant le seuil d’entrée de ma maison,
Puisse-t-il mettre fin à son obstination
En s’avouant vaincu et en pleine déroute
Tels des soldats battus marchant le long des routes.

Ce poème s’adresse à une personne qui a contracté une dette envers moi et qui s’obstine à ne pas vouloir s’en acquitter, usant de tous les subterfuges et atermoiements et finissant, après maintes tergiversations, par éviter de me rencontrer.